René-Lévesque – préoccupations à court terme ou vision d'avenir : quelqu'un devra trancher

Rencontre de travail sur l’axe colline Parlementaire-Université Laval, mardi soir, au Centre de loisirs Montcalm, à Québec.

L’enjeu: l’aménagement d’un boulevard vert (René-Lévesque) au coeur de la ville.  Un boulevard où cohabiteraient – laissons-le au conditionnel… pour le moment – le transport en commun, le transport actif (cyclistes et piétons), et l’automobile.

Des options : sur Père-Marquette (version « Bike Boulevard » avec réduction des arrêts, pour les cyclistes) et Grande-Allée. La première a reçu de nombreux appuis, la deuxième n’a aucune chance de survie.

Une salle bondée, environ 250 citoyens se sont présentés. Au cours de la soirée, une cinquantaine d’interventions. Plusieurs pertinentes, plus dans un sens que dans l’autre. Je vous laisse deviner lequel. Plusieurs redondantes. Certaines carrément inutiles. J’appréhendais une séance de démolition. Ce fut quand même très civilisé, malgré certaines interventions un peu plus musclées.

Une question… sans réponse, à l’heure actuelle : comment ça va coûter?

Une autre question : l’hiver, on fait quoi?

Un os dans le fromage : le stationnement.

L’apocalypse

Plusieurs commerçants du coin (Cartier/René-Lévesque) y voient le commencement de la fin. Si on enlève les cases de stationnement, sur René-Lévesque, comme le prévoient certains scénarios, c’est la catastrophe, plaident plusieurs d’entre eux. Ils ont des raisons qu’il faut comprendre… mais comme vision à long terme, c’est faible, comme argument. C’est leur seul, d’ailleurs. Pas documenté, en plus. Un seul – résidant/retraité, je présume – est venu à leur défense et s’est donné la peine de faire un décompte, pour contredire des données qui étaient pourtant basées sur des prémisses différentes.

Marie Dooley, designer, se présente comme opératrice d’un commerce de destination. «Il faut du stationnement devant ma porte», dit-elle, en substance. Pourtant, Bertrand Marois, sur Petit-Champlain, à Québec, lui aussi designer (que j’encourage depuis plusieurs années), fait de bonnes affaires… sur une rue piétonnière. Si on aime quelqu’un, est-ce qu’on va cesser de l’aimer s’il faut marcher un peu pour aller le ou la voir? Mais bon… les cyclistes ne sont pas des clients assez convaincants.

Ceci étant, j’ai beaucoup de respect pour les artistes, les créateurs et tous ceux qui donnent une sens à notre âme collective, mais, par pitié, cessez de ne jurer que par l’auto.  Votre problème, ce n’est pas le manque de stationnement, c’est qu’il y a trop d’autos. Et si on ne provoque pas, rapidement et fermement, un changement dans les habitudes citoyennes, ca fera encore plus mal, dans 10 ans.

Dans un plaidoyer fort convaincant, Alain Crevier, animateur à Radio-Canada, a refroidi certaines ardeurs quand il a expliqué que, à vélo, il allait travailler, qu’il allait faire ses courses et quoi encore, tout en étant résidant du quartier ciblé par ce projet controversé. «Il faut avoir un peu d’audace et d’imagination… le statu quo n’est plus permis», a-t-il lancé. Les opposants ont figé.

«Le premier argument, c’est la santé publique», a fait valoir un autre intervenant. Et la santé publique ne passe certainement pas par l’automobile.

La conseillère municipale du quartier, Anne Guérette, a eu beau faire valoir la nécessité de «rechercher une solution qui suscite l’adhésion collective»; il semble que certaines positions sont, pour le moment, irréconciliables. Un point en sa défaveur, elle est conseillère de l’opposition… et vous savez ce qu’en pense, notre maire, de l’opposition?

Le respect

L’intervention la plus spectaculaire est venue de Pierre Bernier, alias Pierrot Vélo. Spectaculaire et simple, à la fois, car sa solution est basée sur le respect. «Si les automobilistes  respectaient l’article 341* du code de la sécurité routière, on n’en aurait pas besoin de pistes cyclables!»

Sa solution, donc, pour promouvoir le respect? Une signalisation sur la chaussée, dans toutes les rues de la ville… au coût de 2,5 millions de dollars. Pas mal moins cher que tous les aménagements prévus, selon lui. Il a un point! Sauf qu’il faudra toujours, si on veut développer le cyclisme comme mode de transport alternatif et efficace, sécuriser les personnes âgées, les gens moins performants, les débutants et, surtout, NOS ENFANTS.

En plus, ce n’est pas «big» comme geste, ça ne fait pas figure de symbole…

Quoiqu’il en soit, Jeanne Robin, présidente de Promo-Vélo, un organisme voué au développement du réseau cyclable de la région de Québec depuis plusieurs années, décrit la situation en trois points.

«Il y a un réel besoin d’améliorer les conditions de pratique du vélo sur l’axe est-ouest, étant donné l’achalandage mesuré par Promo-Vélo de 5000 cyclistes par jour. (1662 à l’heure de pointe du matin). Il faut, également, améliorer la desserte en transport collectif.

«Deuxièmement, il y a une diversité de besoins, et un seul axe ne peut pas répondre à tous: nous suggérons de combiner plusieurs aménagements. Dans un premier temps, Père-Marquette, puisque c’est faisable à très court terme: il faut y mettre des mesures de contrôle de la circulation, en même temps qu’on y enlèverait les « arrêts » pour les cyclistes. Il importe également de négocier au plus tôt les droits de passage sur les terrains qui « coupent » le trajet. Dans un second temps, René-Lévesque, puisqu’il faut de toutes façons y enlever les stationnements pour améliorer le transport collectif. Il faudra également améliorer Chemin Sainte-Foy, notamment en aménageant les intersections pour les rendre plus sécuritaires pour les cyclistes.

«Troisièmement, on travaille pour le futur. La Ville a fait un plan de mobilité durable, avec l’objectif de doubler la part modale du transport collectif et celle du vélo. Cela ne pourra pas se faire si on recule à chaque fois pour préférer le statu quo. Le plan de la Ville pour René-Levesque est ambitieux, c’est un geste fort en faveur de la mobilité durable. Il faut le faire, pour les cyclistes actuels et surtout pour ceux qui seront de plus en plus nombreux à prendre leur vélo dans l’avenir.  Nous (Promo-Vélo) soutenons la proposition sur René-Lévesque, avec les bandes cyclables en rive.»

Les citoyens intéressés peuvent consulter tous les documents pertinents sur le site de la Ville de Québec.

L’exercice n’est pas terminé car il y aura des audiences publiques et présentations de mémoires le mardi 5 octobre prochain. Il faut s’incrire au plus tard le jeudi 30 septembre, à 16 heures, encore une fois, sur le site de la ville. Pour le dépôt des mémoires, un délai est accordé, jusqu’au 5 octobre.

Conclusion? Nous sommes en 2010 et partout, partout, partout, sur la planète, la circulation automobile est devenue un problème majeur, coûteux à tout point de vue. Même si le maire, dans ce cas, se montre un peu plus timide qu’à l’habitude, quelqu’un devra trancher, parce que l’unanimité, oubliez ça. D’un côté ou de l’autre, il y aura toujours des mécontents. Les irritants, les spécialistes, en restant à l’écoute, pourront sans doute trouver des solutions pour les éliminer ou, à tout le moins, en atténuer les effets négatifs.

* 341. Le conducteur d’un véhicule routier ne peut dépasser une bicyclette à l’intérieur de la même voie de circulation que s’il y a un espace suffisant pour permettre le dépassement sans danger.

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  1. «Il y a un réel besoin d’améliorer les conditions de pratique du vélo sur l’axe est-ouest, étant donné l’achalandage mesuré par Promo-Vélo de 5000 cyclistes par jour. (1662 à l’heure de pointe du matin). Il faut, également, améliorer la desserte en transport collectif. »

    Excusez moi mais c’est complètement farfelu comme chiffre! C’est incroyable mentir de la sorte pour pousser vos idées! Et que faîtes vous des 6 mois d’hiver par année?

    • Bonjour,
      Sur quoi vous basez-vous, pour accuser, comme ça, les gens de mentir? Les gens de Promo-Vélo pourront vous expliquer la façon dont ils ont procédé pour arriver à ce chiffre. Quant à l’hiver qui dure six mois, je me demande, là aussi, où vous avez pris cette information. Octobre, novembre, décembre, janvier, février et mars, c’est ça, votre hiver? On est le 5 octobre, il fait beau soleil, il y a plein de cyclistes sur les routes et il en sera de même tant qu’il fera beau. L’an passé, la saison s’est terminée, à toutes fins pratiques, le 29 novembre, et elle a recommencé à la mi-mars…
      Mais l’idée n’est pas de s’obstiner sur la longueur de l’hiver mais de voir comment on peut améliorer les conditions de pratique, 12 mois par année. Derrière tout ça, c’est le changement, dans un sens large, qu’il faut préconiser et promouvoir. L’automobile est en train de faire mourir le centre-ville.

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