Voici mon ultra récit d’ultra-cycliste et organisateur de course à propos du premier défi d’ultracyclisme de la saison: Ultra 12h du Saguenay qui s’est déroulé le 17 avril dernier. L’événement comptait 21 engagés! L’événement fut d’ailleurs remporté par l’athlète d’ultra-trail Alexandre Genois qui en était à sa première expérience dans un tel événement sur route! Bonne lecture!
Il est 7h du matin, moi et mon équipe sommes déjà sur le parcours en train de faire les derniers préparatifs pour faire en sorte que le parcours soit le plus sécuritaire possible. Nous avons repéré tous les nids de poules, il y en avait 37 !! Je les ai moi-même marqués à la cacane un à un, reste juste à appeler les gars d’la ville pour qu’ils viennent patcher car la job de repérage est déjà faite. Peut-être un nouveau sideline pour moi ??
Bref, à 7h45 je suis sur la ligne de départ, nous serons officiellement 21 au départ, toutes catégories confondues. Je suis content d’y retrouver mes amis ultra crinqués, Jessica et Paul, avec lesquels j’ai participé à l’Ultra défi l’an dernier. Il y a aussi Carol Chenel, un petit nouveau dans le monde de l’Ultra, qui est ma foi hyper sympathique! Bref il y a de la joie, il fait beau, pas très très chaud, mais ça aurai pu être pire.
Après les directives d’avant départ, la commissaire donne le go à 8h pile! On part !! Le tout débute relativement mollo et une fois le faux plat monté, je suis éberlué de constater que le peloton est presque complet! Nous sommes 11 à rouler de façon bien homogène, ce qui n’est pas super dans ma tête! Ça roule un peu en «mononcle», ça jase de la pluie et du beau temps!
J’ai rien contre le fait de jaser en pédalant, mais moi je suis là pour pousser mes limites, je décide alors de tout faire péter et faire une première sélection «naturelle». Je profite alors du dernier faux plat du chemin de La Grande Anse pour relancer le tout, je pars de l’arrière et je fonce à plus de 40km/h durant un bon strech de 1km! Je doit avouer que j’ai dû sortir de ma zone un peu! Je me retourne alors confiant d’avoir fait éclater le peloton, mais non tout le monde est encore là! Surprise totale! Je me suis dit à moi-même, soit je suis vraiment pas en forme, soit le calibre est vraiment fort sur ce 12h! Au fil des heures, j’ai compris que le calibre était vraiment fort !!
Un peu avant la première vraie descente que j’ai amoureusement nommée “la KOSOVO downill” je savais qu’il serait plus prudent de réduire le peloton, car 90% des nids de poules sur le secteur se situaient là et la ligne de roulement étant parfois mince, il fallait prévenir les chutes. En fait, il fallait que tous puissent voir clair pour le premier tour! J’ai donc repris les devants à ce moment-là et au lieu de dire «OK les amis on ralenti, faites attention aux nids de poule» j’ai mis le plein gaz à droite et suit passé à la vitesse grand V !
Après cette section dangereuse, je me retourne de nouveau. Tout le monde y est encore! Je me rends à l’évidence, la première sélection se fera dans la côte numéro 1 du rang St-Martin!
LE PARCOURS
Il est divisé en 4 sections bien distinctes où chacune d’elles peut correspondre à un type précis de cycliste.
La première partie est un long faux plat de 3km sur le chemin de Grand-Anse, suivie d’une longue section de 7km dans les champs, sur le plat certes, mais exposée aux grands vents avec aucune place où se cacher !! Pour plusieurs, c’est cette section qui fut la plus dure mentalement.
Ensuite il y a une petite section sur le boulevard St-Jean-batiste qui cumule trafic et poussière et surtout vent en pleine poire! Puis s’en suit la première descente, sur un peu plus de 5km, ça descend non-stop! Il faut faire aussi un peu de slalom, car tous les nids de poules s’y trouvent !! Le parcours se poursuit avec une toute petite section de 2km bien plat avant d’affronter la fin du parcours baptisé «l’enchaînement St-Martin», soit une série de 3 bosses complétant un total de 29,1km et de 290m de D+ par tour !
En moyenne un tour se bouclait en 1h10mais, mais le premier tour se joua en 55min !! Et comme les 10 premiers se sont faits en «rando du dimanche», imaginez combien l’enchaînement St-Martin c’est fait en criant ciseaux!
RETOUR DANS L’ULTRA PELOTON
Une fois la première bosse gravie, nous sommes encore 6 en avant. À la 2e, nous sommes encore 5 et finalement rendus à la 3e et dernière bosse du parcours (et la pire des 3) nous ne sommes que 4.
Bel et bien seul devant avec le petit groupe, je peux enfin respirer, mon boulot est fait, la course peu débuter J.
Le tour suivant se fait sans histoire! Je suis en compagnie d’Érick, Alex et Seb, la cohésion est super ! Ça roule ma poule, presque pas de vent, magnifique soleil du printemps, un bon tempo dans les 30-32km/h et une très bonne avance sur le second peloton, tout va bien!
Après les deux premiers tours, je me retrouve seul en avant avec Alexandre, les deux autres ayant fait une pause ravito. Pendant 2 secondes, je me demande si nous devrions les attendre ou non ? Mais Alexandre roule bien et nous avons une bonne entente, alors nous poursuivrons notre route. Alexandre en est à son premier événement de vélo, avec déjà plus de 90km dans les pattes, il est tout fringant, et discute! De mon côté, je suis déjà en mode «cruise contrôle»! Je dois garder l’accent sur mon coup de pédale! Je lui dis gentiment, qu’il peut continuer de me parler, mais moi, je ne pourrai lui répondre autre chose que oui ou non! Que voulez-vous, je suis de même! Quand je suis en mode ultra, je dois vraiment me concentrer sur ma petite routine si je ne veux pas souffrir. Ma petite routine, elle est assez simple, mais faut jamais en déroger sinon… c’est capoute!
Après le 3e tour je n’en peux pu, je dois faire une pause pipi!! Alex fait de même. Nous sommes alors rejoints peu après par Érick et un autre. On fait tous une petite pause au ravito avant d’entamer le 4e tour. Alex repart tout de suite, moi je suis un peu plus lent a redémarrer, car je ne suis pas pressé en fait!
Je suis sur le 12h en mode «préparation» afin de me faire un fond pour mon premier vrai défi de la saison 2016. En effet, le 30 avril prochain, je vais rouler pour une cause qui me tient à coeur; la Fondation pour l’enfance et la jeunesse du Sag-Lac. Ma petite virée se nomme:À cause tu roules de même? Je me suis engagé à faire rien de moins que la traversée complète (ou presque) de notre belle région, de Petit-Saguenay à Chibougamau en moins de 24h! Vous comprendrez qu’il fallait faire travailler mon mental et à partir du tour 5, le mental fut mis à rude épreuve, je vous en passe un papier!
J’apprends alors que Jessica nous suit et qu’elle n’est peut-être que 5 ou 6minutes derrière nous. Bien que nous en sommes à notre 3e événement ensemble, je n’ai jamais vraiment eu la chance de rouler avec elle, alors je décide l’attendre puisqu’Erick est encore à l’arrêt lui aussi.
Voilà qu’entre deux bouchés, je vois Jess qui passe telle une fusée et Erick se sauve au même moment! Je décide de partir à la chasse, car Erick roule bien et je crois que Jess est plus motivé que jamais. Une chance, je n’ai pas à chasser trop longtemps, car il y a une petite bosse et Érick adore les côtes, tellement qu’il roule avec une 27 afin de passer le plus de temps possible dans les côtes!
Une fois Jessica rejointe, nous la dépassons, mais elle n’accroche pas notre train! Tout de suite je me dis «oh, Jess feel un mauvais coton!» Une fois rendu sur le plat Erick et moi avons un petit questionnement; doit-on attendre Jess ou non ? Puis nous venons tous deux à la conclusion que nous ne devrions pas être inquiets pour elle, elle saura nous rattraper!
Je ferai donc le 5e tour au complet avec Erick. De retour au point de départ pour le 6e tour, j’ai chaud! Je décide alors d’enlever mon coupe-vent! Puis, je prenais mon temps pensant qu’Erick m’attendrait, mais non, il n’est jamais arrêté! Je ne lui en veux pas pour autant, car on ne s’était rien promis. Sachant que Jessica ne devait pas être trop loin derrière, je décide cette fois-ci de l’attendre pour de bon et être visible!! Elle arrive près de 10 minutes après moi, elle semble complètement à terre, vidée, bref, c n’est pas la JESS que je connais!
Elle arrête à sa voiture de ravito… elle discute avec sa maman, l’espace d’un moment j’ai eu peur qu’elle se décourage, qu’elle abdique! Je lui lance alors que je vais repartir avec elle et rouler ensemble un bout! Elle ne me l’a pas dit, mais sûrement que cette parole lui a fait du bien, car en moins 2, son sourire était revenu et elle était prête à partir!
MES ERREURS
Je suis repartis peut-être 5-6 min après elle, pensant la rejoindre! Erreur numéro 1, elle était déjà très très loin devant. Erreur numéro 2, le vent était si froid dans les champs que d’avoir abandonné mon coupe-vent était loin d’être payant!
Ma troisième erreur fut de sous-évaluer la condition physique des autres participants! Voyant que je ne revenais pas du tout sur Jess et que le froid allait venir à bout de moi j’ai décidé de prendre ça cool.
Note à moi-même: Dans un vrai ultra (tel l’Ultra défi) ça marche, car tu as le temps de chasser tes idées noires, mais dans un 12h alors qu’il ne reste que 4h à faire, on n’a pas ce luxe! Quand tu casses et que ton moral est à terre, c’est fini pour toi!
Je décidai donc tout de même de prendre ça cool et de faire une pause au second ravito tenu de main de maître par Sylvain St-Gelais, rien de moins, lui savait très bien par où je passais, car Sylvain est également un ultracycliste. Il a même fait un podium à l’ultra défi l,an dernier!!
Je décide donc de m’arrêter au ravito pour jaser avec Sylvain St-Gelais, un ultra-cycliste ayant fait un podium à l’Ultra-Défi l’an dernier et qui tenait le poste de main de maître. Puis je repars, tranquille et seul pour ainsi finir mon 6e tour.
Pour le 7e, je me dis que ce sera mon dernier! Je ne parviens pas à me réchauffer, je ne suis plus dans la course du tout,et je manque clairement de motivation! Soudain, je me fais rejoindre par Paul et Vincent, puis on croise Sébastien qui a eu une crevaison. Rendu au fort de Sylvain St-Gelais, je décide a nouveau d’y arrêter et de piquer autre une jasette afin d’attendre Sébastien. Mais en moins de 2, il me passe sans même ralentir au ravito…
Je n’ai plus les jambes pour le rattraper et une fois le tour 7 terminé, je sens qu’il faut en rester là, mais il n’est que 17h! Il reste donc encore un bon 3h de vélo, ce qui me laisse le temps de faire encore un tour ou même deux
Mon 8e tour se fait à une vitesse moyenne fulgurante de 14km/h (ah ah ah honte à moi !!) À ce moment, je me répète sans cesse une citation du film La Haine, qui dit simplement :
Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien!
Mais le moral n’y est plus, j’ai froid, j’ai faim, mais les jambes tourne toujours, je suis sur le petit plateau, je mouline à peine, mais j’avance encore!
Arrêté au ravito de mon ami Sylvain, pour lui signifier que c’était bel et bien mon dernier tour, je me prends à prendre volontairement mon temps afin d’être certain de pas avoir assez de temps pour faire un 9e tour!
Je terminerai finalement mon périple de 8 tours en presque 10 heures pile! En fin de compte, j’aurais peut-être encore eu le temps pour un 9e tour, mais cela n’aurait absolument rien changé à ma position et l’appel du houblon et l’envie folle de jaser avec les amis, tranquille, au chaud, furent plus fort que tout !!
L’an prochain je ferai 9 tours, promis !!!
AVEC LE RECUL
Je me rends compte que la gestion de l’effort, le mental et surtout la stratégie de course sont différents entre un 12h (en boucle) et une “vraie” course d’ultra.
Dans une vraie course sur un parcours don’t chaque km est différent, les épreuves s’enchaînent, mais ne viennent qu’une seule fois!
Dans un 12h, tu sais après le premier tour ce qui t’attend lors des prochains! Mentalement c’est très très dur.
Puis stratégiquement aussi, c’est très différent. Sur un 12h on peut revoir du monde qui on un tour de moins que nous et l’inverse est tout aussi possible. Ce qui est peut-être très décourageant! De plus, sur une course en boucle, il est impossible de gérer par l’arrière, car la distance étant courte on sait en tout temps qui est où, donc ça ne laisse pas trop de place pour jouer au chat et à la souris! Il y a donc une seule stratégie de possible selon moi sur un 12h en boucle; rouler devant, rouler fort, et faire casser les autres, ce que fit Alexandre à merveille J !
J’en profite justement pour saluer et féliciter Alexandre qui en était à son premier événement d’ultracyclisme à vie !! Ça promet pour le futur !! Je remercie aussi toute l’équipe du RUQ et les bénévoles qui ont fait de cette première édition un franc succès !!
Pour les amateurs de chiffres…mon Ultra 12h du Saguenay:
- Nombre de tours complétés: 8
- Temps: 9h58min
- Distnce totale: 233KM
- Moyenne roulée: 26km/h
- Moyenne réelle (incluant pauses): 23,3km/h
- Dénivelé positif: 2320m
- Poids au départ: 192livres
- Poids 3h après l’arrivée: 193 livres ( sûrement une erreur)
- Calorie brûlée: envieront 6 000 kj
- Gourdes vidées: 8
- Gel consommé: 1
- Pause pipi: 3
- Nombre de tours «a walk in the park»: 5
- Nombre de tours «welcome to the HELL» : 3
- Nombre de marmotte morte: 1
- Nids de poules: 37+1 (en effet nous avons assisté à la naissance d’un nid de poule sur le boulevard St-Jean Baptiste)
Crédit photo: Jessica Belisle
Très beau récit Sylvain. Je prend des notes pour l’an prochain.